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Décembre
2004
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La pensée
musulmane entre le divin et l’humain.
Réflexion sur une herméneutique appliquée
en vue d’un renouvellement du sens.
par Tareq Oubrou
Recteur des mosquées de Bordeaux (*)
L’Islam étant une religion du Livre, la pensée
qui s’en dégage est forcément une herméneutique. « Lis au nom de ton
Seigneur qui créa, Il créa l’homme d’une adhérence (‘alaq)[1]…
qui enseigna par le calame, Il enseigna à l’homme ce qu’il ne savait pas ». Ce
premier verset révélé du Coran annonce d’emblée la nature de l’Islam et la
double herméneutique qui caractérise la pensée musulmane en ouvrant un autre
livre, celui de la création, la Nature. J’introduis dans le mot Nature l’Homme
avec toutes ses manifestations culturelles (sociologiques, anthropologiques,
ethnologiques…) qui informent phénoménologiquement sur sa nature, singulière
dans l’Ordre de la création, comme propédeutique à une ontologie qui ne peut,
cependant, être accessible qu’asymptotiquement.
Deux sources de la connaissance : le
Livre (el-kitâb) et la Nature (el-kawn).
Lecture
théologique ou anthropologique ?
La pensée musulmane n’est pas exclusive dans la mesure où la
soumission aux Écritures n’est pas antinomique à l’interprétation dans
l'objectif d'émanciper la connaissance. En effet, certaines méthodes utilisées
pour étudier la Nature ne sont pas exclues de l’approche des Textes
scripturaires. L’islam dans toutes ses dimensions n'est pas toujours lisible
uniquement et immédiatement à partir des Écritures. Établir a priori une théorie de lecture qui
s’intéresse au sens des Textes en même temps qu’à leur vérité, n’a jamais été
totalement écarté. Le débat des Anciens (es-Salaf)
et des Modernes (el-Khalaf) sur ce
sujet est bien connu. Je n’entrerai pas dans la légitimité et les fondements
philosophiques et théologiques de cette posture intellectuelle. Une vérité
reste cependant unanime, la démarche cognitive ne s’arrête pas au niveau
autocentré sur le Texte coranique puisque multiples passages coraniques
appellent à une double réflexion (en-nadhar) :
l’une portée sur les Textes révélés eux-même et l’autre sur les lois
naturelles. Se déplacer alors par rapport aux donnés révélés est donc possible
car ils ne sont pas tous invariablement des points finals, ils peuvent être des
points de départ, des jalons pour la raison afin de lui éviter des voies d’une
connaissance sans issue. Cependant, un principe éthique reste de rigueur :
on procède toujours selon la méthode historique d'interprétation qui ne crée
pas une rupture entre l'Écriture et son statut et son origine métaphysique.
L’herméneutique ne doit pas glisser vers un simple effet herméneutique. La
religion dans cette perspective, si elle n'est pas perçue intégralement comme
une sphère autonome du sens, n’est pas non plus essentiellement hétéronome. Il
y a une rationalité. Elle se trouve dans les Textes (Coran et Sunna), comme dans
l'entendement humain. Pour illustrer cette vision, citons l’exemple des
traditionnistes-critiques (ahl el-hadîth).
Ils ont établi des règles d’authentification des hadîth du Prophète, laquelle constitue la deuxième strate d’une
même Révélation, la première étant le Coran. Une de leurs règles stipule :
tout récit non admis par les Lumières Naturelles ni conforme aux Lois
Naturelles est classé historiquement apocryphe[2].
Certains savants de l’islam ont ouvert la porte de l’ijtihad
à un non musulman s’il en a les capacités intellectuelles et s’il l’inscrit
dans la logique intrinsèque globale de l’islam et s’il en a l’intelligence[3].
La vérité s’impose par son argumentation, et non pas par le niveau de piété de
celui qui la formule[4].
Cet avis canonique ouvre la pensée théologique et normative islamique sur la
voie d’une certaine universalité. Il faut souligner, cependant, que la
dialectique qui existe entre la raison humaine et les Textes divins est bien
complexe.
L’islam en tant que religion peut être théologiquement
lisible en y reconnaissant l'effet d'une cause (Dieu) qui agit métonymiquement.
En même temps une démarcation intellectuelle s’impose pour parer à une
identification de Dieu au Coran et/ou à la Nature, dans le sens où Il serait
tout sauf transcendant, confondu ontologiquement avec Sa parole révélée
et /ou à la Nature. Si le Coran est la Parole de Dieu incréé,
irréfragable, la manifestation ad extra
du Verbe éternel dans sa descente (tanzîl)
ne signifie ni une union ni une unité substantielle, essentielle. Le rapport de
l'expression coranique dans son articulation vocale avec Dieu est uniquement un
rapport de communication. Quel que soit l'ordre sacré et transcendant du Coran,
il ne peut être assimilé, quant à l'expression de son essence, à Dieu. Il est signe
incréé, émanant de l'Essence divine, mais il n'est pas Dieu. Ce n'est pas Dieu
qui s'est fait Verbe, mais le Verbe s’est fait écrit, Livre. La confusion entre
Dieu et le Coran ne peut jamais se produire, car il y a toujours dans la
Tradition musulmane une nette distinction entre le signe symbolique ('ayât) et la Vérité ultime. L'Acte divin
manifesté dans le temps, quelle que soit la forme qu'il revêt, n'est point
sujet d'adoration. Le Coran est vénéré, sacralisé, mais pas – cultuellement –
adoré.
Quant à la lecture dont il s’agit dans l’injonction
coranique : « lis au nom de ton
Seigneur …» n’est pas une récitation passive de l’information révélée
ni une réception inactive d’une donnée de la Nature. Elle est indubitablement
une interprétation : une herméneutique (ta’wîl) qui remonte les
enseignements scripturaires et les enchaînements causals des phénomènes jusqu’à
leur source et cause premières : Dieu. Ceci revient au sens même de la
Révélation en arabe (wahye) qui veut
dire signe (’ayât), relevant d’une double pertinence sémiologie :
coranique et cosmique (celle de la Nature).
Centrée
sur deux aspects, l’approche normative et légaliste – pour ne citer que cette
dimension de l’islam – se fait selon une herméneutique qui devra déchiffrer le
sens du Texte qui précisément se dissimule dans la manifestation du donné
révélé sur la légitimité d’une norme et selon une approche discursive en
correspondance avec une certaine explication phénoménologique de la Nature et
de la culture dans laquelle elle est censée s’articuler. Le registre notionnel
de la légalité religieuse se situe alors dans / entre ces deux herméneutiques,
c’est-à-dire dans un sens circulaire, joignant les deux bouts :
« canonico-scripturaire » et « théologico-naturelle »
en conciliant l’Ordre législatif ou Volonté divine normative (Qadar char’î) – tel qu’il se présente
dans les Textes scripturaires – à un Ordre existentiel[5] (Qadar
kawnî), tel qu’il se présente dans la Nature et la culture. Avec un œil sur
le Texte, l’autre sur le contexte, le risque d’un strabisme herméneutique est réel. En tout cas, l’effort pour
atteindre l’harmonie ou la synergie visuelle de la Raison est exigé. L’exercice
intellectuel à ce niveau peut donc se résumer en cette opération qui consiste à
corriger en permanence cette « diplopie ontologique » (M. Blondel)
que rencontre cette double herméneutique. C’est un point nodal de la notion
qu’on appelle l’ijtihâd chez les
juristes, et en-nadhar el-‘aqly (perception
de la Raison, en quelque sorte) chez les théologiens
En quête d’un
paradigme islamique pour répondre à la modernité.
Ce
paradigme nous permettra de distinguer ce qui, dans l’Islam, relève du champ du
sacré permanent d’une part et du temporel en mouvement de l’autre. C’est lui qui
nous permettra par conséquent de lire correctement la Révélation à la lumière
de notre époque. C’est alors une certaine vision de l’Islam, qui ne sera
statique que si l’on suppose immuables toutes ses dimensions pénétrées
d’an-historicité. Une telle vision serait tout aussi fausse que l’extrême
opposé, qui ne veut connaître (ou reconnaître) de l’islam que sa composante
historique et contingente. Discuter de cette question cruciale que rencontre la
pensée musulmane conduit inévitablement à un vaste puzzle peu maniable, dans
une démarche qui doit aller vers une cohérence afin que chaque élément,
domaine, puisse y trouver sa juste place.
La
perception adéquate de la raison musulmane, à mon sens, permet de considérer
que la synthèse à ce niveau est à la fois intrinsèque – avec des mécanismes
d’interprétation formels qui demeurent à chaque époque et que l’on peut donc
ressaisir à la nôtre, parce qu’ils font partie d’un héritage et de cette Raison
islamique invariante qui se perpétue – et historique, parce que le savoir se
renouvelle, s’élargit mais aussi se crée en disciplines, techniques,
perceptions, méthodes et logiques d’applications nouvelles à la dimension de
notre siècle.
En
terme herméneutique, je conçois que le discours islamique aujourd’hui consiste
à enchaîner un nouveau discours au discours des textes scripturaires
(coraniques et prophétiques) à partir de leur univers spatio-temporel originel.
Ce travail théorique ou théorétique herméneutique, s’inscrit aujourd’hui dans
une situation de paradoxe, la nôtre, c’est-à-dire dans un contexte
civilisationnel inédit et imprévu que ni le schéma interprétatif classique des
Textes-références (Coran et Sunna) ni les mécanismes principologiques (‘usûl
el-fiqh) concernant le normatif n’ont directement résolu. Cette nouvelle
entreprise herméneutique devra informer sur la capacité de reprise liée
substantiellement au caractère ouvert du discours coranique primordial qui est
censé parler à des hommes dans une histoire et une culture du moment coranique,
tourné en même temps vers un universel spatio-temporel. L’interprétation et
l’argumentation scripturaire (deux procédés différents mais cependant liés)
sont l’aboutissement concret de cette continuité et de cette succession
(enchaînement). L’herméneutique dans cette optique admet un caractère
d’appropriation (notion contenant aussi le sens de rendre
"appropriée" la lecture scripturaire). Le sens profond des Ecritures
n’est pas abandonné, mais médiatisé par une nouvelle interprétation en lien
avec le nouveau contexte, un monde bien différent de celui du moment coranique.
Ce n’est alors pas tant la substance de l’enseignement scripturaire qui est
systématiquement universelle mais la forme qu’elle pourrait prendre.
Cet
accomplissement de l’intelligence des textes scripturaires dans une
intelligence de notre condition actuelle caractérise la réflexion islamique
contextuelle concrète. Cette vision herméneutique et cette réflexion
contextuelle ancrée dans notre situation sont, dans ma pensée, corrélatives et
dialectiques. Elles constituent un des éléments de ce que j’ai appelé le
paradigme islamique. La pensée musulmane, dans la fonction herméneutique du
champ scripturaire, ne pourra être sécularisée en dehors du contexte dans
lequel elle s’interprète. Elle ne peut s’accomplir dans le monde
moderne en tant qu’universel si elle s’effectue en rupture paradigmatique ou
épistémologique avec les références scripturaires.
L’appropriation
déjà évoquée est une des finalités de l’herméneutique. Elle consistera à
survoler les différences culturelles et l’espace séculaire qui séparent
l’univers originel du Coran pour atterrir sur le terrain de notre situation
moderne. La réflexion herméneutique devient alors aussi actuelle que notre
lecture de la modernité et son sens. Elle est en quelque sorte une résistance
contre l’éloignement ou l’oubli du sens des Écritures, c’est-à-dire des
systèmes de valeurs que le Coran et la Tradition du Prophète ont établis lors
du « moment coranique ». Autrement, l’interprétation rapproche, rend
contemporain le discours religieux par le renouvellement sémiologique des
significations coraniques et prophétiques apparaissant, historiquement et
culturellement, comme distantes ou étrangères. C’est ainsi que nous pouvons
élever l’exégèse des Textes au niveau le plus haut d’une herméneutique
authentique, en transférant dans une situation culturelle moderne ce qui est
l’essentiel du sens de nos Textes. Un sens qui a revêtu une forme en rapport à
une situation culturelle historique qui a cessé, depuis très longtemps, d’être
la nôtre.
Cette
exégèse devient ainsi une interprétation, c’est-à-dire une traduction de la
signification liée à un contexte culturel à un autre selon des règles qui
préservent l’équivalence de sens. L’interprétation, sémiologiquement parlant,
sera d’autant meilleure qu’elle aura réussi, selon les mots de Roland Barthe, à
déchronologiser puis à relogifier le Texte. C’est-à-dire au
moyen de la subordination de certains aspects syntactiques ou syntagmatiques
temporels et contextuels propres au moment coranique, à un aspect
paradigmatique achronique, actualisable.
Le Texte scripturaire par cette règle montrera sa capacité à se
« décontextualiser », c’est-à-dire à s’affranchir de son contexte
premier, pour se « recontextualiser » dans la situation culturelle
nouvelle. Tout en gardant et préservant son identité sémantique, le discours
islamique, grâce à ce procédé, est rendu moderne
– dans le sens de la contemporanéité sans rompre avec la Tradition ancienne –
par une lecture qui se fait acte d’herméneutique concrète qui devient aux
Écritures ce que la parole est au langage. Elle devient ainsi un événement
situé dans la condition moderne d’aujourd’hui, « instance de
discours » pour utiliser le vocabulaire de Benveniste.
« Raison Critique » ou « Raison
Herméneutique » ?
C’est par égard aux Textes sacrés que j’utiliserais
la « Raison Herméneutique » pour comprendre les significations du
Coran et de la Tradition (Sunna) ; et la « Raison Critique »
pour comprendre toutes les productions de la raison musulmane, humaine :
commentaires des Textes ; théologie musulmane spéculative et mystique, le fiqh
(droit et canonisme) ; toutes les autres sciences islamiques classiques y
compris les sciences du Hadith (authentification et ses procédés…).
Cette « raison critique » s’étend également à la philosophie,
aux sciences sociales ou exactes…
Deux temps d’une même herméneutique.
Si
cette lecture sémiologique peut être renouvelée, c’est parce que le Coran et
son corollaire, la Sunna, ne sont pas des Textes fermés sur eux-mêmes, au
contraire ils exigent une lecture dont la tâche est de lever un certain suspens
qui les touche en les introduisant dans notre monde en parole ou pensée
actuelle. Le processus de sa réalisation est une explication qui prendra
d’abord la voie éclairée et initiée par ces mêmes Textes. En même temps, cette
herméneutique ne doit pas se contenter
de cette explication des Textes dans leur univers et ce que les coranistes
appellent par « circonstances de la Révélation » (asbâbu en-nuzûl).
Cette dimension herméneutique est en quelque sorte sa statique. Elle doit
ouvrir une voie vers leur interprétation – actualisation dynamique par
l’appropriation du sens des Écritures – en empruntant le chemin inverse en
direction du nôtre. La machine principologique (el-’usûl), pour ne citer que cet aspect de la connaissance
islamique, permet à la pensée normative la sortie de la « clôture
scripturaire » en gardant de vue la réalisation des permanences des visées
(el-maqâsed) transculturelles,
trans-historiques. Autrement la sortie du corpus de la Révélation n’est pas une
sortie de l’islam mais une exploration et une inventivité qui trouvent leur
légitimité dans le scripturaire lui-même.
Pour
revenir au concret de cette intégration de l’islam en Europe, je dirai
sommairement qu’une lecture de l’islam issue de cette herméneutique se
démarquera alors de la canonisation d’un Islam sociologique de fait dans le
sens où elle évite que l’enveloppe culturelle n’étouffe le cœur même de cet
islam. En Europe, ce cœur est ce noyau religieux incompressible, dans lequel
tous les musulmans d'Europe peuvent se reconnaître au-delà de leurs affinités
culturelles. Un minimum islamique (théologique, canonique…) nécessaire est
lui-même pensé ici en Europe. Je ne développerai pas ici ces éléments
théologico-canoniques. C'est actuellement l’objet d’un essai où je distingue
l’herméneutique d’un islam dans la sécularisation – laquelle a trouvé sa forme
la plus poussée dans la laïcité française – de la sécularisation de l’islam
lui-même : deux processus nettement différents.
Une communauté d’interprétation ou
l’interprétation en communauté
L’herméneutique
n’est pas la lecture directe des Textes, nous l’avons expliqué. Elle innove
dans l’ambivalence, l’amphibologique et dans les omissions volontaires des
Textes scripturaires grâce au caractère inédit des situations. L’ijtihad comme herméneutique montre que
la distance culturelle et temporelle n’est pas seulement un désert à franchir
mais un medium à traverser. Cette
forme herméneutique est une réinterprétation constitutive d’une tradition
vivante qui permet le transfert du sens coranique.
Cependant,
tant qu’il n’y a pas de tradition, il n’y pas de transfert, d’où l’indispensable
communauté d’interprétation. A ce niveau de l’approche, nous distinguerons deux
formes d’herméneutique. Celle que nous opérons à travers des écrits détachés de
leurs auteurs, et dans ce cas nous essayons de cerner l’autonomie sémantique du
Texte en l’objectivant en tant qu’écrit ;
la compréhension reste cependant difficile sans un retour à son
énonciateur. Les Compagnons du Prophète bénéficiaient quant à eux d’une autre
herméneutique, celle que je peux dire issue de l’agir situationnel, ou herméneutique par réception cognitive réelle et immédiate, qui s’accomplit dans les
discussions et le vécu au quotidien avec le Prophète, auteur de la sunna et
lecteur par excellence du Coran. L’interprétation unanime (el-ijmâ‘) des Compagnons est à cet égard l’aspect le plus achevé de
cette herméneutique. Qu’elle soit intellectualisée ou incorporée dans une
attitude comportementale collective, elle devient dans ce cas précis un Dessein
de Dieu, dans le sens d’une lecture universelle.
Les
générations qui suivirent ont dû affronter la difficulté suscitée par
l’écriture, c’est-à-dire un discours déconnecté de son Locuteur. Cette
herméneutique du scripturaire médiate est moins fiable à coïncider avec
l’intention de son Auteur. D’où l’importance du recours à la Tradition des
Compagnons. Sans eux, et sans la transmission orale et comportementale de
génération en génération héritée de cette herméneutique par contact immédiat
avec le Prophète, les Textes risquent de rester orphelins. Sans ces tuteurs,
qui ont vécu les circonstances de la Révélation, nous restons livrés à
nous-mêmes affrontant ainsi seuls l’aventure de la réception des significations
des Textes de l’islam et la difficulté de leur lecture complexe. Entre ce que
le Locuteur veut dire et ce que les textes scripturaires signifient peut
subsister, sans leur aide, des destins distincts voir opposés. Nous ne pouvons
connaître l’islam sans ce cumul de la tradition et des interprétations formées
dans la communauté de foi depuis les Compagnons, puis leurs Successeurs (tâbi‘în) et ainsi de suite jusqu’à
aujourd’hui. Toute rupture littéraire avec ce cumul énorme d’interprétations
conduira à une rupture épistémologique et une cession paradigmatique avec le
sens originel. Le changement et l’évolution de l’herméneutique ne signifient
pas une rupture mais un enchaînement et une continuité de ce que les Anciens
ont déjà fondé.
(*) Auteur de
divers essais et articles (ouvrage en collaboration avec Leïla Babès chez Albin
Michel ou participation au volume sur la laïcité des Archives de philosophie
du droit), il intervient fréquemment dans les médias culturels (émissions
sur France Culture). Ce texte expose l’un des principaux arguments d’un
livre de synthèse en cours aux éditions Albin Michel.
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© THÈMES V/2004
[1] Ce stade de l’ontogenèse humaine correspond à ce qu’on
appelle aujourd’hui par nidation ou implantation, un stade embryologique où
l’ovocyte fécondé s’accroche à la muqueuse utérine.
[2] Ibn-El-Jawzy d’après
Mohammed Sakhâwy in "Fath el-Moughîth" : Tome 1, p.
269.
[3] Ibrâhim Ech- châteby.
El-muwâfaqâte. Tome 4, p.111. non daté. Dâr el-ma’rifa.
[4] Cependant elle n’est recevable et applicable pour les
musulmans comme norme islamique religieuse que si un mufti qui se l’approprie et
la prononce est de moralité religieuse musulmane certifiée.
[5] J’aurais pu utiliser le mot existential. La
raison en est que théologiquement et philosophiquement l’ordre existentiel
sous-entend pour le saisir un travail herméneutique ijtihadique qui consiste à discerner l’ontologie des choses constantes d’une part et les évènements
liées à la condition historique et à d’autres facteurs conjoncturels, d’autre
part.